Décidément, le sentiment que j'ai depuis que je m'intéresse au climat, à savoir qu'on ne fera rien pour empêcher la planète de se réchauffer, trouve un écho à chaque conférence sur le climat.
Doha, après Copenhague, Cancun (j'en passe), n'échappe pas à cette règle.
Le plus important à retenir de cette conférence c'est que, si les Etats-Unis étaient déjà hors Kyoto, le Canada, le Japon, et, excusez du peu, la Russie, ont décidé de se retirer du processus.
Génial, non!
Donc mes amis, fidèles lecteurs, pas la peine de détailler d'avantage.
Mais peut-on vraiment s'étonner de tels échecs à répétition?
En effet, dans un monde en crise, où les cohortes de chômeurs augmentent de façon dramatique (3000 nouveaux chômeurs par jour en France, actuellement) qui va se soucier de 0.015°C de plus par an?
Vous appréciez, vous, 0.015°C sur votre thermomètre?
Et qui peut se soucier, dans le bruit de fond assourdissant de contraintes basiques allant en s'amplifiant, qu'en 2100 la température globale risque de dépasser la température actuelle de 1.5°C et que le niveau des océans, qui monte à une allure très régulière de l'ordre de 3mm/an, soit monté de 30 à 40 cm?
Et qui peut se soucier que les ours polaires deviennent cannibales?
ou que les coraux dépérissent?
Comme avant chaque conférence, il est très agaçant, c'est un euphémisme, de constater que paraissent des "études" des "toujours les mêmes", qui évoquent des niveaux des océans qui pourraient monter bien plus vite, du permafrost qui pourrait finalement, tout réfléchi, être une bombe climatique, une sensibilité climatique qui serait bien dans la partie haute de la fourchette, alors que rien ne permet de le constater dans le climat actuel.
Certains naïfs espèrent que le nouveau rapport du GIEC va être l'étincelle qui va permettre d'avancer en 2015 dans la lutte contre le réchauffement.
C'est risible.
L'AR5 ne va accoucher de rien de neuf par rapport à l'AR4.
On ne saura toujours rien de plus sur les nuages, sur les aérosols, sur la tenue des inlandsis, sur le changement du cycle carbone, sur les variations d'activité solaire passées et même présentes, sur l'influence de ces mêmes variations d'activité sur le climat, sur la température pendant l'Optimum Médiéval, etc. etc.
On apprendra qu'on ne sait toujours pas modéliser avec certitude, encore moins prévoir, les cycles climatiques: l'ENSO, la PDO, l'AMO etc. etc.
Quant aux conséquences, on ne saura toujours pas quels vont être les futurs rendements céréaliers, pour ne prendre que cet important exemple.
Et puis je ne parle pas des scénarios socio-économiques inchangés depuis 20 ans environ, dont le volet "ressources de carbone fossile" (pétrole, gaz, charbon), quasi inexistant, pourra permettre à chacun de continuer à dire ce qu'il veut, suivant sa sensibilité.
Enfin, j'exagère, on en saura plus, mais on ne saura toujours rien si vous saisissez la nuance.
Comment voulez-vous que dans de telles conditions, sans parler de la température de surface qui se stabilise depuis presque 10 ans, on dépense des fortunes à essayer de réduire notre dépendance au carbone fossile?
Seule une éventuelle déplétion pourrait y contribuer, mais, à mon sens, elle est encore assez loin.
Non, voyez-vous, je pense que le risque est réel.
Mais je ne peux que fustiger ceux qui ont voulu, pressés par je ne sais quoi mais qui n'a rien à voir avec la science, mettre la charrue avant les bœufs.
Et quand on met la charrue devant les bœufs, tout le monde rigole puis se détourne pour vaquer à ses occupations subalternes qui consistent, in fine, à trouver sa subsistance.
L'Humanité agit toujours sous la contrainte, sous la peur.
On attend toujours que la crise soit là pour agir.
Les exemples, des crises économiques aux guerres, sont nombreux.
Mais là, qui a peur d'un changement climatique rampant, louvoyant, incertain, presque invisible?
L'alarmisme çà marche un temps mais çà finit par être contre-productif.
L'exemple de la grippe H5N1, ou peut-être H1N1, je ne sais plus, est révélateur.
La campagne de vaccination a été un fiasco tel que l'Etat a failli la rendre obligatoire.
Et bien pour le climat c'est pareil, les gens ne le ressentent pas suffisamment pour accepter de faire des efforts,encore moins des sacrifices.
A mon sens, dans le contexte actuel, ils ont bien raison.
Alors, pour ces quelques prochaines dizaines d'années, on peut penser que le discours sur le réchauffement, souvent contrarié par les variations naturelles du climat, va disparaître peu à peu du paysage médiatique et de nos préoccupations principales.
Cela ne change rien à la réalité des principes physiques qui le sous tendent mais c'est le pari qu'on peut faire.
Les gens vont sans doute s'adapter, pour certains en souffrant, à ce climat qui évolue mollement en traitant les alarmes intempestives au même titre que la fin du monde annoncée par quelques illuminés ou profiteurs de la naïveté naturelle présente en chacun de nous.
Comme vous le savez, j'ai mis ce blog en veille active.
La fréquence des articles a baissé régulièrement, comme dans de nombreux autres blogs français consacrés à ce sujet (quoique c'est pas mieux sur certains étrangers comme Realclimate, par exemple, dont la déconfiture fait peine à voir)
Ce n'est pas tant que les études scientifiques diminuent mais, franchement, comment traiter d'un sujet où des études, pourtant peer-reviewed, se contredisent intégralement?
Je ne vois pas l'intérêt d'écrire que la science est en marche et que c'est son fonctionnement normal.
Ce serait un encouragement à une incompétence globale (je ne vise pas les gens) et puis j'ai peut-être autre chose à faire que de défendre un système, une organisation des sciences, qui déresponsabilise les individus.
C'est comme çà que je le ressens en tous cas, et je crains de ne pas être le seul.